“Vivez le film de votre vie en tant que réalisateur et personnage principal, influencez son cours et agissez si nécessaire pour le modifier. Jouez votre partie jusqu’au bout.”
Lilly Raffa
L’exécution d’une frappe devrait entrainer une série de sensations censées l’accompagner en séquence. Un enchainement de phases tout à fait intérieur, assimilable aux scènes d’un film, image après image.
Dans le domaine de la cinématographie il existe – étant utilisée par ailleurs en certains moments d’un film – une technique appelée « dilatation du temps », consistant à ralentir le déroulement des actions pour emphatiser des situations spécifiques.
Nous voici au cœur de la question. Pour comprendre vraiment et donc apprendre un mouvement, ce serait fonctionnel de le décomposer en plusieurs phases, au niveau mental et du contenu, sans pour autant nuire sa forme ; à savoir, en parvenant à une exécution motrice optimisée.
Au fur et à mesure qu’on monte en niveau et que les capacités proprioceptives de l’athlète se développent et se consolident, en le rendant plus conscient et impliqué dans les mouvements de son corps (spécialement au cas où ces mouvements seraient plutôt complexes et combinés, comme dans le tennis), on ressent la sensation d’agir en étant « obnubilé » par une sorte « d’effet replay », bien qu’en réalité la vitesse d’exécution de la frappe soit assez accentuée. Il s’agit de ressentir l’énergie traversant progressivement le corps, toujours plus intensément, qui démarre du sol (des pieds) pour enfin connaître son essor lors de l’impact avec la balle.
Drôle de sujet, celui de l’impact… A ce propos, ce qu’on peut conseiller tout d’abord, c’est de garder son poignet bien ferme… autrement dit, il ne faut absolument pas être lâche!
Le poignet est fondamental au niveau des sensations que la balle réussit à nous transmettre. Il s’agit du moyen principal de contact entre elle et nous, compte tenu du fait que le tennis est une discipline qui oblige à se servir d’un outil et n’implique aucun contact physique avec son adversaire (à ce propos, une psychologue du sport dit un jour que le tennis est un sport « sournoisement violent » car il ne satisfait pas l’instinct de relâcher la tension en frappant directement l’adversaire ; le joueur doit en revanche essayer de porter atteinte à celui-ci en utilisant simplement une balle, pendant un nombre indéfini de fois, le tout par le biais d’un outil).
Dans le tennis moderne (contrairement à celui “historique”), qu’importe le niveau, qu’on soit débutant ou professionnel il est quasiment impossible de comprendre quelle zone touchera la balle à partir de la simple observation.
Par conséquent, le fait de « retenir » plus ou moins la balle sur le cordage, même pour des instants de temps infimes et aux vitesses exacerbées du tennis moderne, devient synonyme de contrôle et maîtrise de la balle, afin que celle-ci puisse toucher une zone déterminée du court, d’une certaine manière et avec une marge d’erreur plutôt réduite, grosso modo avec une certaine efficacité.
L’une des raisons réside dans le fait que la technique est en train de devenir de plus en plus personnalisée et spécialisée, bien que d’éminentes études physiques et scientifiques sur le tennis de haut niveau essaient d’isoler des paramètres plus ou moins généraux, auxquels les initiés peuvent faire référence dans le cadre de l’enseignement de la discipline. En ayant affaire à des situations plutôt hétérogènes, chacune ayant sa spécificité, comment faut-il se comporter ?
Pour répondre à cette question, une bonne méthodologie pourrait être celle de communiquer avec la balle (se rappelant que la communication en tant que telle est bidirectionnelle et implique la présence de deux entités capables d’agir, à savoir l’émetteur et le destinataire du message).
C’est uniquement à partir d’une observation attentive et scrupuleuse du “cycle de vie” complet de la balle (à savoir depuis le démarrage de la raquette de l’adversaire jusqu’à l’impact avec la nôtre) qu’on peut saisir ses caractéristiques - trajectoire, longueur, rotation, vitesse (accélération ou décélération), direction, déplacements imprévus – dans l’optique de préparer une réaction et une action appropriées.
Celui qui s’entraine avec un coach ou bien pratique de l’autodiscipline individuelle, devrait faire constamment référence, au cours de l’échange (et pourquoi pas durant un match aussi), à la balle « vivante », à savoir jusqu’au moment où celle-ci arrête de bouger d’un côté à l’autre du terrain, en adaptant ses propres ressources cognitives et motrices à sa dynamique.
Ainsi faisant, le coach ou l’adversaire deviennent des “intermédiaires” dans la communication/échange entre la balle et le joueur ; en même temps, ce dernier a la possibilité de s’exprimer pas son propre jeu sans contraintes de la part de son rival, devenant ainsi le réalisateur et le personnage principal de son film/match. Au-delà du résultat (victoire ou défaite), il y aura certainement un happy end, puisqu’il s’agissait tout de même d’une expérience constructive vécue par soi-même.